953 – Les jours où l’oreiller s’attache à moi

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Textuels : poème, extensions, fragments

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Textuel poème 

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  •  Un objet s’attache ou on s’attache à lui. L’oreiller est fait pour dormir à poings fermés. Un oreiller n’a pas d’attache, pourtant le mien ne se détache de ma tête, qu’il aura épousée, pour la forme, la nuit durant.  Je le serre fort en mes bras comme s’il m’aimait, là !  Il y a des jours comme ça, où l’oreiller s’attache à moi, et je me dis pourquoi me lever, moi qui aime tant rester couché. Je sais que j’ai tort mais c’est doux parfois de faire le mort. D’une humeur vagabonde de tête de lit, je traîne des pieds, au fond de mon lit, je m’y étale, en long et en large et en rêveries, pour me lever, rassasié, juste un peu avant midi. En cet état de fumage, chômage, mon imagination est la folle du logis : je pense à tout et à rien, aux images fugaces me traversant l’esprit, occupant mon cœur. Elles ressemblent à des vies de substitutions épisodiques, au réveil, qui ne laisse de traces, après la douche : évanouies !  A croire que l’eau lave non seulement le corps, aussi l’esprit. Qui me certifie qu’elles ont bien existé en moi : dès lors qu’elles ont fui, elles ont filé, elles ont coulé dans les eaux usées pour se faire traiter en épuration avant d’être recyclées. Je marmonne dans mes sarcasmes, marmotte en mon terrier : l’hiver bat son plein et sur ses sols gelés, la nature s’arrête  en plein marasme, sous asthme ! Mort, endormi, éveillé, paralysé : pas un de mes muscles ne bouge, mon cerveau perçoit tout en rouge, me file une frousse carabinée de ne pouvoir me mouvoir. En ouvrant l’œil, je vois ma chambre, plongée encore dans la pénombre, je distingue une ombre qui brille comme ambre autour de la fenêtre : le soleil  cherche à entrer ! Ma chambre est l’antichambre de mes rêveries, où moindre délire est permis tant que je reste entre deux états de conscience, le cerveau un peu vaseux, creux. J’ai repensé à mille choses en différé puis en accéléré. La pluie m’a réveillé de ce cauchemar morose en tapant sur les battants des volets de ma fenêtre. Encore était-ce bien moi, ou quel qu’autre personne, tant mon cerveau droit détonne de son plein de fantasmes, sournois.

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Textuel extensions

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  • Ah si tous les oreillers du monde pouvaient enregistrer le fond et la forme de nos pensées : qu’adviendrait-il de nous ! Il me demeure fidèle, il connait tout de moi ! S’il n’y avait la pluie, je me serais rendormie, elle a fait du bruit et l’oreiller mouillé ne peut l’étouffer : un cauchemar m’a réveillé. Dormir sur les deux oreilles et panne d’oreiller. Ces deux  expressions sont impossibles à tenir, ou bien c’est l’oreiller qui se foutrait de ma tête en disant qu’il s’est attaché à elle en amoureux. Il est vrai qu’il est très doux et fort enveloppant mais il est loin d’être le partenaire convaincant. Faut s’en méfier, quand il sert à nous s’étouffer ; faut l’arranger quand on est assis au lit, lisant ; faut le changer, s’il perd sa mémoire de forme. Un oreiller, pour deux, est ce qu’il y a de mieux ! Victime d’une panne d’oreiller, dit un employé, arrivant très en retard à son boulot, entreprise,  soit il faut changer d’oreiller, de réveil, sommeil, soit il faut admettre qu’on fainéantise en son lit.   Dormir, la tête enfouie dans un mauvais oreiller, présage d’un mauvais sommeil, d’une nuit agitée et a contrario, s’il est  trop confortable, désirable,  nous serions enclin, au matin, de jouer les prolongations. Ne dit-on pas que confidences se font sur l’oreiller. Ah, s’il pouvait parler … que d’histoires à raconter. En réalité ce n’est pas le lit, seul témoin d’intimité, c’est l’oreiller qu’il nous faut interroger.

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Textuel fragments

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  • L’oreiller est mon plus grand confident, à mon intimité, participant, forcément, or dieu sait que, bien des fois, pourtant, je le torture comme une poupée en soie. Il y a oreiller et oreillers : le mien me convient, il est grand, épais et de forme à mémoire. Je lui raconte mes histoires de grand soir et il me répond qu’en dormant, tout ira bien ! Quand je lis, dans mon lit, il me soutient, lors je me réveille, le matin, il me retient : pas étonnant qu’il s’attache à moi autant que je m’attache à lui, les jours de blues ! Mais j’ai beau l’embrasser, il ne remplace, jamais le conjoint qui est souvent absent : parti en voyage, en mission pour le travail, à c ce qu’il me dit : oreiller est son substitut. Il a fini par être un peu trop mou, élastique, et j’ai souvent songé à me débarrasser de lui, de mon oreiller, bien sûr, pas de mon conjoint, encore que pourquoi pas des deux ensemble. Mais tout cela, c’est une toute autre histoire, en tous cas, mon oreiller, ne lui prêterai pas.

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Illustrations : visuels, scénario et fiction

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Visuels 

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953 1

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Se lever, oh non, pas déjà, tant

que mon oreiller n’y consent pas !

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953 2

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Je sors à peine un bras : le reste

se confond avec oreiller, couverture

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Mon canapé, mon oreiller, mon repose

pied, mon ordi : rien d’autre !

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Mémoire de forme, des formes 

Textuels symboliques et corrélations

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Oreillers

  • Symbolique de forme : Pour retrouver le sommeil, on est prêt à tout essayer. Des remèdes à base de plantes pour dormir aux  somnifères chimiques les plus puissants. Des  oreillers rafraîchissant à l’acupuncture, en passant par la cuillère d’huile de foie de morue.          Source  modifié : ensemble-literie.com/sommeil-et-reves

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Mémoire de forme

  • Symbolique de fond : Tout oreiller, à mémoire de forme, comme son nom l’indique, lui permet de s’adapter à chaque dormeur. L’oreiller à mémoire de forme va  donc  mémoriser l’empreinte cervicale de chacun, ce qui lui permettra de soulager les points de tension de la nuque. Un tel oreiller est tout adapté aux personnes sujettes aux douleurs cervicales. Au confort à mémoire de forme, on peut y ajouter matelas à mémoire de forme.  dodo.fr/oreillers-traversins.

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Attachement > oreille/oreiller ; embrasse/triture, étreint/toi

  • Liens fond/forme   : Si vous voulez dormir sur les deux oreilles, choisissez plutôt un oreiller qui se creuse au milieu, puis qui pliera bien, en deux.  À moins d’avoir les oreilles du même côté, et vous auriez bien du mal à en trouver ! C’est un objet que l’on embrasse fort, qu’on triture, caresse, voire enfonce et qui vous met dans de beaux draps en sommeil dont on ne se souvient pas : oreiller que j’étreins, en croyant bien que c’est toi !  

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