03 – Météo, téléphone, quart de nuit

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Visuels scénario

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Un œil  sur  la  carte  météo 

en vue d’anticiper une dépression,

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je mets fin à mon quart de nuit

se terminant au petit matin,

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c’est alors que je découvre une baleine

qui longe notre voiler !

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Textuel calligramme 

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  • Soumis aux caprices des risées, sans contacts avec le continent, seuls, au beau milieu de l’océan, trois marins se sont organisés, pour le meilleur comme pour le pire, jusqu’à ce qu’enfin, au port, ils respirent. En bateau, il faut savoir attendre avant de  partir. Pour gagner du temps et de l’énergie et du confort de route, il faut écouter la voix de la sagesse du marin qui doute quant à la fenêtre météo avant de sortir ! Pour traverser, trois jours, six nœuds au portant, sur un seul et même bord et d’amure au vent. Nous avons intérêt à bien régler nos voiles et nos tours. Chaque demi-nœud compte au fil des heures, soixante-douze en tout, contigües, nuits et jours. Temps, bateau, moral et vent sont un bonheur. Profitons-en bien car cela ça ne se renouvellera pas de sitôt : le temps change vite en mer sur un bateau et, si l’on y prend garde, il peut tourner au drame. Juste un dernier coup de téléphone, qui à sa femme, qui à ses enfants, sa mère, ses frères et sœurs mais nous ne leur disons pas : adieu, ce n’est pas encore l’heure. Encore que, sait-on jamais ! En tous cas, nous voilà partis, pour trois nuits, en la seule compagnie des grosses vagues comme si nous étions des marins aguerris. À partir de la pointe de Sein, plus aucune nouvelle : treize jours de black-out total, silence radio. Nous n’existons plus : vivants et morts, virtuellement. Nous sommes les seuls à savoir si la vie est belle, si la météo nous tangue ou nous roule. C’est bêtement que nous voguons entre deux vagues, entre deux eaux. Je prends le premier quart, celui de la tombée de la nuit ; l’autre équipier, le suivant, au-delà de minuit ; le capitaine fait le dernier jusqu’au soleil qui luit. A nouveau les équipiers jusqu’en plein midi, le capitaine reprend en début d’après-midi et ainsi de suite jusqu’à mon quart de nuit.

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Textuels extensions

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  • Cet éloignement et cette distanciation de tout, nous poussent vers cette coupure avec le monde des proches et de l’ensemble des humains. La tombée de la nuit nous isole davantage encore comme si le monde disparaissait, peu à peu, autour de nous, nous laissant seuls, face à notre destin, à notre entrain voire à notre chagrin. Pour sûr, le quart ce n’est pas la moitié, mais vous rester concentré, entier. De jour, on s’occupe, y a de quoi faire : cuisine, rangement, voire bricolage. On peut même se laisser aller à la lecture, papoter entre équipiers bavards mais la nuit, pas de lumières, pas suffisamment, faut veiller sans s’éblouir. Près des côtes, l’on surveille, les filets, les casiers, les cailloux, les courants ! Et quand c’est « pétole molle » l’on s’ennuie et l’on a tendance à s’endormir : rien ne vous empêchera de méditer, à fond, sur votre intérêt, d’être vivant ! Un quart, sur un voilier, se pratique de nuit, bien sûr, il y a les instruments de surveillance tels que les radars, les GPS, les AIS, les merveilles, ils ne détecteront pas objets flottants, sautes de vents. Pour garder un bon cap, une bonne allure et tranquillité, rien ne vaut la marche du bateau en regard et main, avisés pour de constants réglages voilure au gré du vent, humeurs afin de pouvoir profiter du ciel étoilé durant quatre heures.  C’est là que les fantasmagories  en tous genres, surgissent qu’en un état hypnagogique, sa conscience, envahissent : certaines nous évoqueront de merveilleuses histoires, d’autres, un fol ennui ; d’autres, souci, peur du noir. Grand moment de solitude, si ce n’est d’hébétude, si l’on n’a de vie intérieure pour combler le vide de l’océan à vous rendre quel que peu déprimé. Grand moment de méditation, contemplation, restant branché sur la mer, nous murmurant qu’on est sur cette planète comme son enfant. Lampe tempête ou autre, allumé, crée un halo, diminue le contraste entre le cockpit et le carré, il vous rassure, il vous tient éveillé… attentionné. Si sommeil vous gagne, bien que, sous ciel illuminé, allez jeter un œil sur votre position sur carte en carré, un autre imaginaire sur destination vous serait ouvert, vous pourrez apprécier la météo, trajet restant à faire.

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Textuel épilogue

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  • Notre premier jour de navigation n’a pas été sinécure de passion : prendre ses marques, ses réflexes, est rythme fort différent d’à Terre. La place est restreinte, comme comptée, faut du temps pour tout déployer, tout ranger et quand une grosse tempête chahute tout le monde : carré comme en hutte. Dieu merci, il fait beau, tous en cockpit. On en profite pour téléphoner à la famille, aux amis. Le signal, tout comme la voix, s’affaiblit : bientôt, le silence complet sera établi. Au premier soir, les quarts sont choisis, le premier me convient, jusqu’à minuit. De toute façon les deux autres discutent, font la fête, on n’annonce pas de suite, une tempête. Nous ne sommes encore très loin des côtes, et donc il peut y avoir des filets dérivants. On ne peut compter que sur  les instruments, l’œil est utile pour faire le complément ! Le noir total se fait vite et plus un bruit. Unique, compagnon précieux : la lampe,  non pour signaler sa position, présence, pour diminuer le contraste en entrant en carré. Le quart ne sera pas la moitié mais parfois, moins du quart du temps plus que la moitié. Le temps est élastique,  il est psychologique : sans stimulation, faut lutter contre sommeil. Sans parler d’être victime d’hallucinations, j’ai perçu  des lumières, très loin, les confondant avec étoiles. Elles se déplaçaient au ras de l’eau, d’horizon, avec des bruits, venus d’on ne sait où, persistants. Si vous n’avez de vie intérieure, imaginaire, l’angoisse vous gagnera au point de réveiller le capitaine, pour vous sécuriser, rassurer, à son grand dam, dormant comme un père. Solitude a de bon quelle vous rend heureux, si vous êtes à même de contempler les cieux sinon, elle vous angoissera au plus profond, vous laissera un souvenir amer,  moribond.

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Textuels symboliques

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Lampe-tempête

  • Symbolique de forme :  La lampe-tempête est une lampe à pétrole transportable et dont la flamme est protégée du vent. Mais il en existe  deux modèles, améliorés au cours du  XX° siècle: à recyclage d’air : le type ancien, et à recirculation d’air chaud, aujourd’hui abandonné.  Le modèle actuel, à recirculation d‘air froid, est nettement plus efficace. Les deux modèles sont à mèche plate, avec un verre plus ou moins bombé. (Wikipédia : lampe -tempête)  La présence de la lampe-tempête évite de s’endormir, elle sert de veilleuse pour tenir éveillé, rassuré. De nos jours une lampe  électrique la remplace mais n’aura pas même charme, usage.

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Quarts

  • Symbolique de fond : Sur un bateau, en route en permanence,  y a nécessité d’assurer une veille constante pour éviter les abordages et pour surveiller la météo, toujours imposé à l’équipage. Les durées et nombres de «quarts» sont très variables en fonction de la taille de l’équipage et du type de navire. Lors, une journée est découpée en 6 quarts. Wikipédia : quats bateau

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Corrélations >  nuit, Lune, lampe, café, bateau

  • Liens fond/forme  :  Le quart de nuit se fait dans la nuit noire, parfois éclairée par quartier, pleine Lune : nul besoin, en tel cas, de présence de  lampe mais en autres cas, celle-ci rassurera un peu. Elle permet de passer de tout cockpit, aveugle, au carré qu’on allume  pour aller consulter le GPS et la carte sur la table ou se faire chauffer un café pour se tenir éveillé. Arrive qu’on s’endorme, bercé ! Un bateau, croisé de nuit, sans personne, dans le cockpit est comme abandonné, sans lampe, en haute mer,  et il y a lieu, parfois de donner du klaxon pour le vérifier lors des quarts, qu’un cargo … ne le fera pas même si vous êtes devant, et une baleine non plus :  « A bon entendeur, salut ».

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